Version en anglais d’abord paru dans Huffington Post
Par Sandeep Prasad
Novembre : la grippe est de retour, et avec elle, ces congés que le médecin nous imposera si nous tombons malades. Voici donc le mois idéal pour militer en faveur de congés de maladie payés pour tous les travailleur(euse)s.
Ils sont des millions en Ontario à ne pas avoir de congés de maladie payés, de sécurité d’emploi, ni même de congés sans solde en cas d’urgence. Pour bon nombre d’entre eux, les congés de maladie n’existent tout simplement pas.
Ce trou béant dans la protection des travailleur(euse)s a un prix, révélateur de l’iniquité en matière d’emploi : de piètres résultats cliniques, surtout chez ceux qui ne gagnent pas beaucoup ou qui occupent un emploi précaire. Nous qui œuvrons et militons dans le milieu de la santé, nous savons que nombreuses sont les personnes qui souffrent de cette iniquité et qu’il est temps que cette situation change au plus vite. Nous unissons donc nos efforts pour que ces travailleur(euse)s aient enfin gain de cause.
Le gouvernement de l’Ontario en est à réviser ses lois régissant le monde du travail, dont la Loi de 2000 sur les normes d’emploi, seul texte offrant une quelconque protection aux travailleur(euse)s non syndiqués. Le temps est donc propice au changement et à l’instauration de congés de maladie payés.
Action Canada pour la santé et les droits sexuels est fière de s’associer à la campagne Fight for $15 & Fairness et demande au gouvernement de garantir à tous les travailleur(euse)s des congés de maladie payés et la protection de leur emploi en cas d’absence, sans obligation de fournir un papier du médecin.
Les travailleur(euse)s qui ne disposent pas de ces congés doivent choisir entre leur santé et leur chèque de paie, risquant parfois de perdre leur emploi. Ce choix est déchirant dans le cas d’une personne malade ou en situation d’urgence, et qui doit quand même payer son loyer et ses factures ou voir aux besoins de ses enfants. Dans l’intérêt du long terme, ce choix peut exiger des sacrifices à court terme, comme retarder un traitement, sauter un rendez-vous ou un suivi, ou se soigner soi-même avec tous les risques que cela comporte pour soi ou sa famille. Le manque de congés de maladie payés limite les choix qu’ont les travailleur(euse)s en matière de santé, y compris sexuelle et reproductive.
Dans les faits, cela peut empêcher une femme souhaitant un avortement de prendre congé pour obtenir ce service. Cela peut l’obliger à retarder un rendez-vous, compliquant d’autant son accès à ce service et augmentant ses frais, puisque l’avortement n’est offert qu’en début de grossesse dans certaines villes ou provinces. Cela peut aussi empêcher un(e) travailleur(euse) de consulter un spécialiste dans le cas d’une maladie chronique comme l’hépatite C ou le VIH, ou de faire soigner une ITS pourtant banale comme la chlamydia, compromettant ainsi sa fertilité. Cela peut priver une femme enceinte de soins prénataux, ou l’exposer à des problèmes à son travail si elle est malade à cause de son état. Après l’accouchement, cette femme peut ne pas pouvoir consulter un spécialiste du plancher pelvien pour éviter les conséquences à long terme d’une cystocèle. L’impossibilité de prendre un congé de maladie peut avoir de graves conséquences!
Ce manque de congés aggrave la marginalisation de certains pans de la population. Les compagnies les moins portées à accorder des congés de maladie payés et à garantir l’emploi d’un(e) travailleur qui doit s’absenter sont celles qui offrent déjà les salaires les plus bas et qui embauchent principalement des femmes et des minorités visibles : commerces de détail, restaurants et entreprises de soins personnels.
Les travailleur(euse)s qui gagnent peu n’ont tout simplement pas les moyens de prendre congé.
Un autre obstacle se rajoute à la perte de revenus : la perte de confidentialité découlant de l’obligation de fournir un papier du médecin à son employeur en l’absence de congés de maladie non payés. Certains services de santé sexuelle ou reproductive demeurant mal acceptés, il est donc d’autant plus important de garantir la confidentialité dans pareils cas : l’obligation de demander congé et de faire justifier cette absence par un médecin peut être un obstacle insurmontable pour certain(e)s travailleur(euse)s. Prévoyant, à tort ou à raison, d’être pénalisés, ces travailleur(euse)s renonceront aux soins dont ils ont besoin, risquant ainsi leur santé.
Le lien n’est plus à faire entre le manque de congés de maladie payés et les mauvais résultats cliniques en santé sexuelle et reproductive, sans oublier le non-respect des droits à ce chapitre. Le manque de congés de maladie payés oblige les travailleurs à choisir entre leur santé et leur chèque de paie. Les congés de maladie payés et la protection de leurs emplois en cas d’absence permettent aux travailleurs de se soigner et de s’occuper de leurs familles tout en leur garantissant la souplesse et la confidentialité dont ils ont besoin.
Pour en savoir davantage sur cette campagne en faveur de congés de maladie payés pour les travailleur(euse)s, cliquez ici (en anglais seulement)