En moins d’un mois depuis l’accession à la présidence de Donald Trump, nous avons déjà observé une inspirante démonstration mondiale de résistance et de solidarité ralliant des millions de personnes, dans des dizaines de pays, sur sept continents. Peut-être étiez-vous du nombre?
Le 21 janvier, des gens ont pris part à des marches des femmes partout dans le monde afin de manifester pour la justice sociale, économique et climatique, et contre le président Trump. Au Canada, des dizaines de milliers de personnes ont participé à des rassemblements dans des villes aux quatre coins du pays. Basés sur le plaidoyer et sur la résistance de multiples communautés au nom d’enjeux interconnectés, ces mouvements demandaient – et continuent de demander – que les gouvernements, les médias et les citoyens entendent leur appel à l’équité et à la justice.
Mais ce que Donald Trump ignore de la justice pourrait remplir un livre qu’il n’ouvrira jamais.Deux jours après la Marche des femmes, Trump a rétabli la règle du bâillon mondial, un décret présidentiel interdisant l’octroi d’aide étrangère étatsunienne aux ONG qui fournissent des services d’avortement, qui militent pour ceux-ci ou qui ne font même qu’en discuter. Sa décision va non seulement à l’encontre de la tendance aux politiques internationales plus libérales (qui ont considérablement réduit le nombre d’avortements non sécuritaires dans le monde), mais elle fait fi également de toutes les causes pour lesquelles nous marchons.
Le président pense pouvoir stopper les avortements, mais il ne fait que les rendre moins sécuritaires. Et cela aura certainement des conséquences mortelles pour des femmes du monde entier.
Les États-Unis sont le premier bailleur de fonds du domaine de la santé sexuelle et génésique dans les pays en développement – et plusieurs de nos partenaires internationaux dépendent de ces ressources. Le gouvernement étatsunien a joué un rôle crucial en aidant d’autres pays à réaliser les droits des femmes par l’amélioration de l’accès à des moyens de contraception modernes, le renforcement des systèmes de santé, la fourniture de services de santé essentiels aux survivantes de violence sexospécifique, et plus encore. En 2016 seulement, les fonds affectés ont permis de fournir des services et des moyens de contraception à 27 millions de femmes et de couples, en plus de prévenir six millions de grossesses non planifiées, deux millions d’avortements non sécuritaires et 11 000 décès maternels. Tous ces gains sont à présent en péril.
Le rétablissement de la règle du bâillon mondial par Donald Trump est une violation flagrante des droits des femmes. Et ce n’est pas tout. Sa version de la « règle » est plus stricte que celles des législatures antérieures. Cette politique étatsunienne a été abrogée et rétablie plusieurs fois par le passé, mais la version Trump va au-delà des itérations précédentes et s’étend à la totalité de l’aide financière en santé mondiale fournie par les départements du Gouvernement des États-Unis. Cela signifie que la politique élargie touchera jusqu’à 9,458 milliards $ du financement mondial en santé, y compris pour des programmes de santé maternelle, de planification familiale, de prévention et de traitement du VIH/sida, et plus encore.
Les impacts politiques et financiers seront dévastateurs et profonds; des millions de vies sont en jeu. C’est pourquoi nous avons urgemment besoin de votre aide.
Le temps est venu pour le Canada et ses alliés (gouvernements et organismes de la société civile) d’intensifier leurs efforts pour protéger et faire avancer la santé et les droits sexuels et génésiques. Le gouvernement néerlandais a déjà manifesté son intention d’établir un fonds international pour financer l’accès à la contraception et à l’avortement sécuritaire dans les pays en développement, afin de combler les lacunes créées par la règle du bâillon mondial. Et grâce à notre étroite collaboration avec le cabinet de la ministre du Développement international, Marie-Claude Bibeau, et à nos recommandations solides, nous avons entendu plusieurs choses prometteuses de la part du gouvernement canadien – notamment qu’il planifierait d’augmenter son budget d’aide internationale pour les droits et services liés à la santé sexuelle et génésique (possiblement par le biais du fonds néerlandais). Or des promesses ne constituent pas des actions.
Le Canada doit jouer un rôle de leader et défendre les droits et la santé des femmes. L’heure n’est pas aux gestes timides. Notre pays a l’occasion de montrer au monde entier que nous ne tolérerons pas l’injustice – que nous croyons que les femmes ont le droit de prendre des décisions concernant leur corps, peu importe où elles vivent. Nous travaillons fort à faire en sorte que cela se concrétise.
Depuis un an, notre équipe collabore étroitement avec des députés et des ministères clés du gouvernement canadien afin d’enrichir leurs connaissances sur la santé et les droits sexuels et génésiques et de les renseigner quant aux considérations clés de politiques aux paliers national et international. Dans les jours qui ont suivi la signature de la règle du bâillon mondial par le président Trump, ce travail ardu a porté fruit : nous avons interagi chaque jour avec le cabinet de la ministre Bibeau pour stimuler la réflexion sur les implications de la règle, partager nos recommandations et envisager des occasions de coopération internationale.
Nous avons également mobilisé des appuis à travers le monde et publié une déclaration condamnant explicitement la règle du bâillon mondial et exhortant le gouvernement canadien à augmenter son financement du développement et ses efforts diplomatiques. La déclaration compte plus de 70 organismes signataires d’un éventail de domaines de la société civile, notamment des ONG, des syndicats, des cliniques et d’autres, du Canada et d’autres pays.
L’union fait la force; ensemble, nous pouvons faire en sorte que notre gouvernement tienne ses promesses. Nous feriez-vous un don dès aujourd’hui pour appuyer ce travail crucial?
Vous devez savoir que votre aide fait toute la différence. Ce mois-ci, après pratiquement trois années de plaidoyer d’Action Canada pour une mise en marché rapide et sans restriction, Mifegymiso a enfin été mis en vente au Canada. Et l’an dernier, après 35 années d’organisation et d’action, il a été annoncé que l’avortement chirurgical allait être disponible à l’Île-du-Prince-Édouard – mettant fin à cette honteuse réputation de seule province canadienne à ne pas offrir de services d’avortement. Ces développements sont réjouissants et positifs pour l’histoire des droits sexuels et génésiques au Canada, mais ils ne sont pas arrivés d’eux-mêmes.
Les droits humains ne se défendent pas seuls. Sans les efforts inlassables et les sacrifices de nombreux activistes, militants, professionnels de la santé et donateurs comme vous, il nous serait impossible de prendre le virage des soins d’avortement accessibles ou de connecter chaque jour les gens à des choix déterminants pour leur avenir génésique. Mais notre travail au Canada est loin d’être terminé.
Même si l’homologation de Mifegymiso est une bonne nouvelle, le médicament n’est pas encore disponible à grande échelle en raison de ces restrictions, qui demeurent : une distribution uniquement par des médecins; des exigences de formation pour les médecins; et une limite gestationnelle inutilement restrictive, entre autres. À ce jour, le distributeur canadien du médicament a reçu seulement quelques commandes. Si seuls de rares médecins prescrivent Mifegymiso, son potentiel d’accroître l’accès à l’avortement sécuritaire au Canada en restera là – un potentiel inexploité.
Nous avons besoin que notre gouvernement fasse en sorte que la pilule abortive soit accessible à tout individu qui en a besoin, et non seulement à quelques privilégiés. Par conséquent, cette année, nous renouvellerons nos efforts de plaidoyer dans l’espoir de faire assouplir les restrictions restantes relativement à Mifegymiso. Nous exposerons nos arguments au ministère de la Santé, parlerons à des députés clés et mobiliserons des appuis. Nous ferons la promotion de Mifegymiso auprès de centaines de médecins canadiens et les mettrons en contact avec la formation dont ils ont besoin pour distribuer le médicament. Nous croyons qu’en rehaussant la sensibilisation et en renforçant la capacité des professionnels de la santé, nous pourrons accroître l’adoption de la pilule abortive et la rendre accessible au plus grand nombre possible de personnes.
Nous collaborons avec des partenaires et alliés partout au Canada afin que l’accès élargi et opportun à l’avortement sécuritaire devienne une réalité. Par exemple, à l’Île-du-Prince-Édouard, nous interagissons avec des activistes sur le terrain pour promouvoir les services d’avortement nouvellement disponibles dans la province – des organismes comme Abortion Access Now PEI, avec lequel nous avons co-publié un commentaire éditorial dans le quotidien The Guardian de Charlottetown. Nous ferons également la promotion de l’utilisation de Mifegymiso auprès de médecins de l’Î.-P.-É., afin que le seul hôpital (et bientôt le Centre de bien-être des femmes) fournissant des services d’avortement puisse optimiser ses ressources et réduire le temps d’attente pour la procédure. En offrant une option plus précoce, Mifegymiso pourrait aider tous les résidents et visiteurs de l’Î.-P.-É. à exercer leurs droits génésiques à l’endroit et au moment où ils en ont besoin.
De plus, nous surveillons étroitement des efforts communautaires, au Nouveau-Brunswick, qui visent à tenir le gouvernement provincial responsable au regard de la Loi canadienne sur la santé. Même si la loi fédérale considère l’avortement comme un service médical essentiel et assurable dans toutes les provinces, le régime d’assurance maladie du Nouveau-Brunswick ne couvre pas les avortements en clinique privée. En 2017, nous appuierons et amplifierons les messages et les efforts d’activistes communautaires comme Justice reproductive Nouveau-Brunswick, un organisme qui lutte pour que l’avortement soit entièrement financé par le gouvernement, peu importe s’il est effectué dans une clinique ou à l’hôpital.
Beaucoup de travail nous attend et les enjeux sont de taille. Ensemble, nous pouvons défendre les droits sexuels et génésiques au Canada et dans le monde.
Il y a deux ans et demi, lorsque nous avons fusionné l’Association canadienne pour la liberté de choix, Action Canada pour la population et le développement et la Fédération canadienne pour la santé sexuelle, nous avions la vision d’un organisme solide et durable qui ferait avancer la santé et les droits sexuels et génésiques en érigeant un pont entre le contexte national et mondial. Grâce à votre appui, nous avons réalisé cette vision. Notre travail est plus fort, car nous prenons part à un mouvement national et mondial diversifié pour l’avancement et la protection de notre santé et de nos droits. Nos collaborations avec des partenaires mondiaux et canadiens renforcent notre capacité de faire du plaidoyer, d’éclairer les politiques publiques, de rehausser la sensibilisation et l’éducation, et de fournir des services qui réduisent les obstacles rencontrés par les plus marginalisés et les moins bien nantis de notre communauté.
Notre réussite est votre réussite. Action Canada existe non seulement grâce à des gens comme vous, mais aussi pour des gens comme vous.
Cela signifie que si des gains durement acquis en matière de droits génésiques sont menacés ou renversés, nous défendrons les Canadien-nes et les citoyens du monde qui ont moins de choix et de libertés.
Cela signifie que si la vague d’indifférence et de complaisance du président des États-Unis à l’égard de la vie des femmes menace d’inonder le Canada, nous construirons un barrage.
Cela signifie que si des décisions concernant l’accès et l’équité en matière de santé sexuelle et génésique pourraient bénéficier de l’expertise canadienne et internationale, nous bâtirons des ponts.
Et cela signifie que si les mouvements et les marches des opprimés sont pris d’assaut, nous serons solidaires et lutterons pour la justice.
Vous savez tout comme moi que le rétablissement de la règle du bâillon mondial par le président Trump n’est que la première étape de ce qui sera sans doute une offensive de quatre ans contre nos droits génésiques durement acquis. Nous ne pouvons nous permettre de rester complaisants face aux développements ici au Canada. C’est pourquoi nous avons besoin de votre aide. Prendriez-vous un moment, dès maintenant, pour appuyer nos efforts en faisant un généreux don à Action Canada?
Votre passion, votre courage et votre engagement nous inspirent. Merci. Je suis convaincu qu’ensemble, nous pouvons résister aux forces qui cherchent à restreindre ou à révoquer les droits des opprimés, et défendre la liberté sexuelle et génésique ici et dans le monde.
Cordialement,
Sandeep Prasad
P.S. La Marche des femmes n’est pas une affaire d’un jour, pas plus que ne l’est la défense des droits et des soins de santé pour les femmes. Devenez un donateur mensuel et aidez-nous à prendre la défense de la justice sexuelle et génésique jour après jour!