Lorsque l’Ontario a mis à jour son programme d’éducation sexuelle, il y a trois ans, c’était la première fois en plus de vingt ans. Songez au nombre de choses qui ont évolué depuis les années 90, sur des questions comme le consentement et la reconnaissance des droits humains des personnes et familles LGBTQ2+. Les progrès des 20 dernières années ont aussi modifié radicalement les manières dont les jeunes découvrent le sexe et les relations, et les moyens par lesquels ils et elles en parlent – Snapchat, en 1998, ne faisait pas partie de la réalité.
Aux Pays-Bas, où l’éducation sexuelle est complète et obligatoire, et débute dès l’école primaire, la majorité des gens affirment que leurs premières expériences sexuelles ont été positives, neuf adolescent-es sur dix utilisent une méthode de sexe plus sécuritaire lors de leur première expérience sexuelle, et le taux de grossesse adolescente se situe parmi les plus faibles au monde.
Une éducation sexuelle complète a des effets positifs sur la santé et le bien-être des jeunes, mais lorsque des politiciens et des politiciennes dénigrent cette éducation et que des reportages médiatiques légitiment ces attaques en leur accordant une place exagérée et en présentant l’opposition à l’éducation sexuelle comme s’il s’agissait d’un phénomène répandu, c’est le début d’un discours néfaste et mal informé. Disons-le sans détour : la santé et le bien-être des enfants et des jeunes se retrouvent alors sacrifiés en étant utilisés comme un appât facile pour obtenir des clics sur le Web et pour acheter des votes à l’aide de propos sensationnels.
Les voix des jeunes personnes sont souvent laissées pour compte, dans des décisions qui ont des conséquences sur leurs vies – en particulier lorsqu’elles ne peuvent pas voter.
Compromettre l’accès des jeunes à l’information et à des compétences de vie n’est rien de moins que mettre en jeu la santé des gens. Il y a de réelles conséquences négatives, lorsqu’on ne reçoit pas l’information précise qu’il nous faut pour vivre en sécurité et en santé.
Or le droit international sur les droits de la personne garantit le droit des enfants et des jeunes à une information scientifiquement exacte ainsi qu’à l’éducation sur la santé sexuelle; de plus, il reconnaît les jeunes en tant que titulaires de droits. Les enfants et les jeunes ont par conséquent le droit de recevoir une éducation sexuelle de qualité. On n’a pas le loisir de leur retirer ce droit. Le Canada est un ardent promoteur du droit à une éducation sexuelle de qualité auprès d’autres pays des Nations Unies; mais nos gouvernements, qu’il s’agisse du fédéral ou de ceux des provinces et territoires, ne respectent pas leurs obligations à l’égard de ces droits des jeunes, ici-même, chez nous.
La qualité et l’ampleur des programmes d’éducation sexuelle varient selon la province et le territoire, mais dans la majorité des cas ces programmes ne sont pas à la hauteur des normes; et le Canada dans son ensemble doit accroître les efforts pour assurer que les jeunes des quatre coins du pays reçoivent une éducation sexuelle de qualité, répondant à leurs besoins et basée sur les droits humains.
Pourtant, les jeunes ont beaucoup de choses à dire. L’abondance de recherches nous indique que les jeunes ne veulent pas seulement des informations générales sur la reproduction et une démonstration consistant à placer un condom sur une banane. Les relations saines, le VIH et le plaisir sexuel faisaient partie des sujets principaux à propos desquels les jeunes ont dit vouloir être informé-es, dans le cadre du Toronto Teen Survey de 2015 – mais moins de 30 % des jeunes qui y ont participé avaient reçu de l’éducation sur les relations saines et personne n’a déclaré avoir appris quoi que ce soit au sujet du plaisir sexuel.
Nous savons également que les jeunes qui s’identifient comme étant LGBTQ2+ ou qui viennent de familles et communautés LGBTQ2+ ne se voient souvent pas inclus-es dans la façon dont on donne l’enseignement sur des sujets comme la reproduction, le sexe plus sécuritaire et les relations saines.
Offrir le type d’éducation sexuelle que les jeunes désirent, cela ne favorise pas des intérêts spéciaux : c’est plutôt s’assurer que chaque jeune dans la classe reçoive l’information nécessaire afin de vivre sa vie en sécurité et en santé, et de s’épanouir.
Le droit humain à l’éducation sexuelle complète n’est pas une question de débat.
Les parents sont d’accord. En 2014, 94 % des parents ontariens étaient fortement d’accord pour dire que l’éducation sexuelle devrait faire partie du programme scolaire. Au Nouveau-Brunswick, en 2002, ce taux était de 94 %; en Saskatchewan, il était de 92 % en 2008. Mais ces fortes majorités de voix sont obscurcies par une minorité petite, mais bruyante, qui fait opposition aux droits des jeunes, des femmes et des personnes et communautés LGBTQ2+.
En cette époque du #MoiAussi et de l’historique Projet de loi C-16 qui a ajouté l’identité de genre à la Loi canadienne sur les droits de la personne, nous ne faisons que commencer à faire la lumière sur la nécessité de parler du consentement dès le bas âge et sur le degré de violence, de harcèlement et de discrimination que rencontrent les personnes transgenres et de genres diversifiés. De nombreuses choses dépendent de l’issue des élections en Ontario.
Le droit humain à l’éducation sexuelle complète n’est pas une question de débat. En Ontario et en tant que pays, au Canada, nous devons délaisser les discours haineux et les « fausses nouvelles » qui appuient des ordres du jour homophobes et transphobes visant à éroder le droit des personnes de vivre une vie en santé et en sécurité et de prendre des décisions éclairées au sujet de leur vie et de leur corps.