Déjà utilisée dans 60 pays à travers le monde, la pilule abortive RU-486 pourrait être autorisée chez nous dès la mi-janvier. Santé Canada étudie le médicament depuis plus de deux ans.
Isabelle Maher
Mardi, 6 janvier 2015 21:16
MISE à JOUR Mardi, 6 janvier 2015 21:20
Source: Journal de Montréal
«Je ne comprends pas pourquoi c’est si long, les Canadiennes sont privées d’une alternative sécuritaire et efficace. Plusieurs pays ont approuvé la pilule abortive, le Canada devrait faire de même», croit la Dre Hedy Fry, critique fédérale en matière de santé pour le Parti libéral.
Réclamée depuis des années par plusieurs, notamment les groupes de femmes, la mifépristone, commercialisée sous le nom de pilule abortive RU-486, pourrait bientôt être autorisée.
Le délai de 700 jours pour rendre une décision sur un nouveau médicament contraceptif étant largement dépassé, on croit que Santé Canada se prononcera dans les prochains jours.
«Selon le calendrier habituel des procédures, Santé Canada peut faire deux choses: soit approuver le médicament dès janvier, soit demander d’autres informations au fabricant, ce qui reporterait d’un an son autorisation», explique Vicki Saporta.
Jointe à Washington, la présidente de l’organisation proavortement National Abortion Federation suit de près ce dossier et croit que les Canadiens seront bientôt fixés.
Impatience
Plus de deux ans après avoir reçu une demande d’autorisation, Santé Canada pourrait donc donner le feu vert au fabricant du RU-486, le laboratoire Linepharma International, qui a déposé une requête en octobre 2012.
«Notre demande est actuellement à l’étude à Santé Canada et nous ne pouvons pas, à ce moment, communiquer d’informations à ce sujet», s’est contenté de répondre Marion Ulmann, chef d’exploitation de l’entreprise Linepharma.
Santé Canada refuse également de se prononcer sur le processus en cours.
«Nous ne commentons que lorsque la décision positive est rendue», explique le porte-parole Eric Morrissette.
Chaque année au Canada, près de 65 000 femmes mettent fin à leur grossesse. L’arrivée de la pilule abortive pourrait changer la méthode choisie, comme ce fut le cas en France où, dans 50 % des cas, les femmes choisissent le RU-486 disponible depuis 1988.
«C’est une décision extrêmement importante que l’on attend avec impatience», a déclaré Frédérique Chabot, d’Action Canada, un organisme prochoix pour qui la pilule abortive représente un acte médical nécessaire, surtout pour les femmes qui vivent en zones éloignées des grands centres urbains.
«Seulement 16 % des hôpitaux offrent des procédures d’avortement au Canada. Si vous habitez en région ou dans les Maritimes, vous n’avez pas accès aux services d’avortement», ajoute-t-elle.
En attendant l’accès au RU-486, les femmes qui souhaitent avorter à l’aide d’un médicament se tournent vers le méthotrexate, un traitement moins efficace et plus risqué utilisé en chimiothérapie que l’on doit combiner au misoprostol.
«Comme le méthotrexate est utilisé hors étiquette du fabricant, cette méthode n’atteint pas les standards de sécurité qu’offre le RU-486. Le taux d’échec est plus élevé et il met une à deux semaines à agir au lieu de 48 heures», déplore Mme Chabot.
La méthode consiste à provoquer un avortement par la prise d’un médicament qui bloque l’action des progestérones, des hormones essentielles à la grossesse.
- Peut être utilisé dès les premières semaines de grossesse.
- L’avortement se produit en privé et donne l’impression d’une fausse couche.
- La méthode ne requiert ni chirurgie ni anesthésie.
- L’avortement dure entre 1 et 2 jours.
- Coût: en France et aux États-Unis, des pays où le RU-486 est autorisé, un comprimé coûte entre 31 et 100 $ CAD (la patiente doit en prendre trois). Il faut aussi compter les frais d’examen et le suivi médical.
- Taux d’échec: De 1,1 à 5 % selon les études